« Ce petit couple, je veux le revoir, marié, dans les premiers mois de la vie
conjugale », avait dit Henri Langlois à François Truffaut en sortant d'une
projection de Baisers volés. Deux ans après, le metteur en scène renoua donc
avec Antoine Doinel, pour faire de cet éternel ado décalé un homme marié à
Christine, père d'un petit Alphonse et contraint de travailler.
Chronique légère et burlesque du passage à l'âge adulte autour d'une petite
cour d'immeuble désuète où Antoine teinte des oeillets en cherchant le rouge
absolu, de quais de métro où M. Hulot fait figure d'apparition, de cours d'eau
artificiels où Antoine (bien avant Bertrand Morane, « l'homme qui aimait les
femmes ») téléguide de petits bateaux.
Mais c'est aussi pour Truffaut un règlement de comptes mélancolique avec son
double. Son Doinel est un adulte improbable, impossible. Au domicile conjugal,
il préférera de trompeurs parfums d'Orient, juste le temps de perdre Christine.
Puis de la récupérer dans un épilogue qui augure le renoncement mutuel. Pour
Truffaut, comme pour Antoine, l'amour n'est jamais plus beau qu'en fuite.
|