Ex-assistant de Robert Altman, Alan Rudolph n'est pas plus tendre que son
aîné avec l'Amérique. Et, comme l'auteur d'Un mariage, il construit un étonnant
récit choral où l'abondance des personnages et des points de vue ne fait que
renforcer un âpre sentiment de solitude. Il y a d'abord Carroll, jeune
auteur compositeur exilé volontaire à Londres, de retour à Los Angeles dans
l'espoir d'enregistrer un album. Autour de lui gravitent plusieurs femmes,
plus inaptes au bonheur les unes que les autres. Comme Karen, rêveuse
romantique mariée à un homme d'affaires arriviste. Ou encore Nona,
photographe, qui mitraille à tout vent pour combler le vide de son existence...
« Tu veux crier, mais personne n'est là pour t'écouter », chante Eric Wood,
alias Richard Baskin. Dans un L. A. sans âme, les personnages d'Alan
Rudolph se heurtent à une douloureuse incompréhension : les couples
n'ont plus rien à se dire, et les trahisons conjugales procurent un plaisir vite
oublié. Si on ne cesse de se sourire bêtement, comme dans la scène clé de la
« party », les rapports humains ne sont plus fondés que sur l'hypocrisie.
Cette chronique de l'incommunicabilité, très maîtrisée, offrait à Geraldine
Chaplin l'un de ses rôles les plus poignants.
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